TECHNIQUE  
Dimension 47 – février 2018

5 conseils et 5 malentendus en isolation sonore et acoustique

Nous vivons dans un environnement de plus en plus pollué par le bruit. Et contrairement aux charges thermiques, nous en subissons l’impact immédiatement. Par ailleurs, l’isolation acoustique n’est pas un « luxe » mais un droit, qui est imposé par des normes. D’où la nécessité impérative d’accorder une attention suffisante à une acoustique adéquate.

Conseil 1 : sachez de quoi vous parlez

Quand on parle d’acoustique, il est toujours question de décibels. Mais qu’est-ce qu’un décibel ? Un décibel, en abrégé ‘dB’, est le résultat d’un rapport logarithmique qui a fait l’objet d’une convention internationale. Il ne s’agit donc pas d’une unité comme le kilogramme ou le mètre. Se contenter de comparer les valeurs de dB entre elles ne permet de tirer aucune conclusion concrète. 50 dB pourraient être ‘supérieurs’ à 55 dB, tandis que 50 kg seront toujours supérieur à 40 kg. Il est donc très important d’associer une valeur en dB à une ‘grandeur’ pour lui donner un sens. Ce n’est qu’alors que l’on peut savoir de quoi il s’agit. On peut dire, par exemple, que « le niveau de pression acoustique Lp = 55 dB est supérieur à Lp = 50 dB ». Nos propos n’auront donc de sens que si nous comparons des ‘quantités’ égales entre elles.

Conseil 2 : (quand) l’isolation acoustique se justifie-t-elle ?

Quand on parle de comparaisons, une différence de 1 dB (par exemple en ce la pression acoustique) n’est pas audible, sauf par une très faible proportion de la population ayant une ‘audition absolue’. La plupart d’entre nous remarqueront clairement une différence de 3 dB, et une différence de 10 dB est énorme (elle correspond à une réduction de moitié ou à un doublement de la perception du bruit). Sur le plan économique, une ‘amélioration’ de 6 dB est une exigence minimale pour être rentable dans le cadre d’un projet de construction.

Conseil 3 : comparer ce qui est comparable

Les acousticiens du bâtiment n’utilisent pas les mêmes grandeurs en laboratoire et sur chantier. Aussi, évitez de les confondre. Les grandeurs utilisées en laboratoire sont révélatrices du matériau ou de l’échantillon testé, ce qui permet de comparer les performances de différents matériaux ou échantillons. Sur chantier, les variables donnent une idée de la façon dont fonctionne l’ensemble du ‘système de construction’. Cela dépend beaucoup du contexte : design, connexions, géométrie des pièces, et l’on n’obtiendra une image claire de la performance réelle du système de construction que pour ce site particulier. Les exigences normatives concernent toujours les prestations sur le chantier.

Conseil 4 : un habitant se plaint. Que faire ?

La norme acoustique NBN S01-400-1 (2008) pour les bâtiments résidentiels comprend deux niveaux de qualité : le confort ‘normal’ et le confort ‘accru’. Les exigences en matière de confort acoustique normal doivent garantir que 70 % des utilisateurs sont satisfaits. Elles sont considérées comme économiquement justifiées.

Les exigences de confort acoustique accru s’appliquent lorsque les porteurs du projet (client, acheteur, etc.) expriment des désirs particuliers en ce sens ou lorsque le vendeur ou le bailleur s’engage vis-à-vis de cette qualité auprès des futurs résidents. Si ces exigences sont respectées, le pourcentage d’occupants satisfaits est estimé à 90 %, à un niveau de bruit aérien et d’impact normal.

Ce n’est donc pas parce qu’un résident se plaint que la norme n’a pas été respectée. La seule façon objective de vérifier la conformité à la norme consiste à effectuer des mesures acoustiques sur place.

Conseil 5 : « Appartement de luxe à vendre » : une bonne idée ?

Dans le cahier des charges, indiquez clairement la qualité acoustique souhaitée : confort normal ou accru. Vous éviterez ainsi bien des discussions par la suite. Les campagnes publicitaires concernant le projet et/ou les descriptions de qualité dans le cahier des charges peuvent déterminer la qualité acoustique finale. Le prix du bien joue également un rôle important. Ainsi, les termes ‘appartement de qualité supérieure’ ou ‘appartement de luxe’ peuvent implicitement exiger un confort accru, même si le cahier des charges mentionne un ‘confort normal’. En cas de procès, cette différence peut mener à des discussions sans fin. Le bon sens et une approche coordonnée sont très importants à cet égard.

Malentendu 1

« La laine minérale offre une bonne isolation contre les bruits aériens. »

Correction : « La laine minérale possède une bonne absorption acoustique. »

De nombreux professionnels du bâtiment pensent que la laine minérale est un bon isolant acoustique en soi. Or, c’est inexact. La laine minérale est un bon isolant thermique, mais une bonne isolation acoustique nécessite de la masse, et la laine minérale a trop peu. La laine minérale possède en revanche une bonne absorption acoustique. C’est pourquoi il vaut mieux en munir les creux des structures doubles, surtout si elles sont légères (murs intérieurs légers, toit traditionnel à deux versants, etc.). Ainsi, la laine minérale élimine les résonances dans le creux, ce qui améliore indirectement l’isolation acoustique du (double) système. On peut également utiliser la laine minérale comme revêtement de plafond ou mural pour réduire la réverbération dans une pièce.

Malentendu 2

« L’isolation acoustique entre deux pièces est uniquement définie par le mur de séparation direct. »

Correction : « L’isolation acoustique entre deux pièces est à la fois définie par le mur de séparation direct et par les structures latérales. »

La cloison de séparation directe n’est pas le seul élément qui détermine l’isolation acoustique entre 2 pièces. Dans de nombreux cas, les voies ‘latérales’ jouent un rôle important. Il s’agit du chemin suivi par l’onde sonore, par exemple, du plafond d’une pièce à l’autre, ou au travers de murs ou de planchers continus. Aussi, isolez toujours les voies accessoires ou latérales, au moyen soit de cloisons de séparation soit de faux plafonds (dans le cas de structures horizontales continues). Ces parois sont constituées d’un lattis métallique avec mousse PE auto-adhésive, entre lesquelles se trouve un matériau absorbant (laine minérale, par exemple) et deux couches de plaques de plâtre de 12,5 mm d’épaisseur. Dans certains cas, on pourra également utiliser une plaque intérieure en OSB de 18 mm.

Il est important de ‘découpler’ les bords des plaques de l’environnement, Par exemple en pratiquant une saignée que l’on comblera entièrement de mastic souple par la suite. Dans le même ordre d’idées, placez également le lattis métallique à au moins 1 cm de la paroi de base.

Pour les doubles murs séparant deux maisons, il est préférable d’utiliser des structures symétriques, surtout pour les immeubles d’habitation, En remplissant le creux de 5 cm d’épaisseur au moyen de laine minérale, par exemple. Veillez à ce que le plancher ne déborde pas sur la double paroi, sans quoi elle perdra ses propriétés isolantes.

Malentendu 3

« Les planchers flottants doivent être coulés jusque contre les murs. »

Correction : « Les chapes flottantes et le revêtement de sol doivent être entièrement isolés des vibrations de leur environnement. »

Si vous prévoyez une chape flottante, n’oubliez pas les points suivants :

  • Nivelez les canalisations à l’aide d’une couche d’égalisation. Vous créerez ainsi une surface horizontale sur laquelle poser la sous-couche acoustique sous la chape (flottante).
  • Prolongez également la sous-couche acoustique le long des bords afin de former une couche élastique continue. Cette continuité entre sous-couche et bande de bordure est essentielle. Veillez par conséquent à ce que le chevauchement soit suffisant, et n’oubliez pas de fixer les bandes au moyen de ruban adhésif.
  • Si vous utilisez de la laine minérale, n’oubliez pas de fixer un film de PE (Visqueen) par-dessus.
  • En posant le revêtement de sol sur la chape, veillez à ce qu’il n’y ait pas de contact rigide entre celui-ci et les bordures. Aussi, laissez la bordure dépasser et ne la découpez qu’une fois le revêtement de sol terminé.
  • En posant la plinthe, laissez un espace de 3 à 5 mm entre le bas de la plinthe et le revêtement de sol, puis comblez-le à l’aide d’un mastic souple.

Malentendu 4

« Pour l’acoustique, un vitrage 4-12-4 vaut mieux que 4 mm de verre simple. »

Correction : « Le vitrage 4-12-4 est thermiquement meilleur, mais acoustiquement moins intéressant, que 4 mm de verre. »

L’élément clé de l’isolation acoustique est le vitrage, car il constitue un point faible dans les structures traditionnelles. Un vitrage asymétrique, par exemple 6-15-8, est toujours un bon choix. Si vous choisissez un vitrage acoustique, prenez-en un dont une ou deux faces sont stratifiées avec du PVB ou du polybutyral de vinyle (p. ex. double vitrage stratifié asymétrique), comme le 10-15-15-44.2. Ou, encore mieux, optez pour un laminage acoustique amélioré avec des films PVB acoustiques.

Attention, les triples vitrages ne sont pas acoustiquement meilleurs que les doubles vitrages de masse égale, car ils comportent deux cavités ‘résonantes’ ce qui dégrade fortement les performances acoustiques dans les graves. Pour compenser cet inconvénient, vous devrez donc choisir des triples vitrages (asymétriques) plus ‘lourds’.

Malentendu 5

« Les fiches techniques contiennent des informations erronées. »

Correction : « Les fiches techniques sont fréquemment mal utilisées ou mal interprétées. »

La valeur d’isolation acoustique d’un élément de façade (tel que le vitrage) mentionnée dans une fiche technique ne peut pas être comparée à l’isolation acoustique exigée par la norme.

Si vous procédez ainsi, vous commettez une double erreur. D’une part parce que la norme se réfère à l’ensemble de l’élément de façade. Pensons par exemple à une fenêtre : elle est composée de vitrage, mais aussi de menuiserie extérieure et d’attaches. Or, la prestation reprise sur une fiche technique ne portera, par exemple, que sur le vitrage. D’autre part, la norme se réfère également à la surface ‘réelle’ de l’élément de façade, alors que la performance mentionnée sur une fiche technique est (généralement) déterminée sur la base d’un échantillon de dimensions standard. Pour le verre, cet échantillon fait généralement 1,23 m x 1,48 m. Par conséquent, si l’élément de façade est plus grand que celui de la fiche technique, celle-ci sous-estime le résultat ! Faites donc preuve de prudence dans vos comparaisons.

Arch. & prof. Dr. Ir. Marcelo Blasco, gérant BLASCO bvba