TENDANCES  
Dimension 48 – mai 2018

The Home of the Future

Le comportement du consommateur de demain dépend de nombreux facteurs tels que les tendances sociales, les évolutions démographiques, les nouvelles technologies et la mondialisation. Celui qui ne regarde que ce qui se passe aujourd’hui manquera le train vers le futur. Pour éviter cela, WOOD.BE, le centre de connaissances pour l’industrie du bois et de l’ameublement, a invité Carsten Beck du Copenhagen Institute for Futures Studies pour une analyse stratégique de l’avenir du secteur.

Carsten Beck n’est pas un astrologue, un médium ou la version danoise de Madame Soleil. À notre connaissance, les boules de cristal ne lui ont pas été consacrées, même si les prédictions et les interprétations du futur font partie de son champ d’expertise. En tant que futurologue, il analyse et interprète des études, des statistiques, des facteurs émotionnels et des modèles de comportement dans la perspective du développement de tendances internationales. Les mégatendances, nous le savons maintenant, influencent notre façon de vivre, d’habiter, de travailler et de fonctionner. En ce sens, elles auront un grand impact sur notre façon de construire, d’habiter et de vivre ensemble dans le futur. Les développements qui, selon Carsten Beck, joueront un rôle important incluent l’évolution démographique, la démocratisation, l’individualisation, la mondialisation, les développements technologiques, la robotisation et l’attention portée à la santé. En outre, un certain nombre d’aspects sont déjà à l’ordre du jour, mais gagneront en importance en raison de la croissance démographique explosive. Selon les prévisions, notre planète comptera environ 11 milliards de personnes d’ici 2050, soit 3 milliards de plus qu’aujourd’hui. Cette augmentation de la population aura principalement lieu en Afrique et en Asie. Les aspects mentionnés sont liés à la durabilité, à la nécessité d’utiliser l’énergie, l’espace et les matières premières avec parcimonie, et la nécessité de nouveaux modèles de vie et de communautés.

Beingalonetogether

Les changements dans notre façon de vivre et d’habiter se produisent continuellement, parfois inaperçus, parfois radicaux, parfois dictés par la politique. Carsten Beck a illustré, avec deux images, à quel point notre façon de vivre, d’être ensemble et de communiquer a changé dans un laps de temps relativement court. Sur l’une d’elles, une famille classique bavarde joyeusement autour de la table de la cuisine. La vision montre une nouvelle famille composite, dont les membres se sont imbriqués avec leurs jouets numériques dans toute la maison, et où la technologie est universellement présente comme une providence divine, en tous lieux et dans toutes les fonctions. Ou, comme le manifeste Carsten Beck : la technologie en tant qu’élément de guidage, de régulation, de connexion et de communication. « Ces développements technologiques aboutissent à des applications très différentes. Les vêtements intelligents régulent la température et surveillent la santé. Les médecins suivent l’état de santé à distance via l’e-santé et la télésurveillance. Le réfrigérateur conseille des plats avec les ingrédients disponibles. La nourriture imprimée en 3D est en hausse. Les appareils intelligents et les robots se chargent des corvées. Un assistant à domicile intelligent assure non seulement la sécurité, mais peut aussi faire du babysitting. L’e-shopping via Facebook évolue vers le f-shopping au caractère utilitaire. La relaxation se base sur des expériences 4D. La maison est responsable de son approvisionnement énergétique. Les espaces sont flexibles et adaptables instantanément. Une voiture électrique sans chauffeur joue au taxi. » Beaucoup de ces éléments semblent déjà familiers aujourd’hui, et ils se répandront plus largement et à plus grande échelle prochainement en raison de l’intégration plus importante dans le réseau technologique. Jour après jour, tout (et même plus) tourne autour de la technologie, explique Carsten Beck. Cette image du futur ne rend pas tout le monde heureux, selon l’analyse.

Trois perceptions

Carsten Beck distingue trois tendances dans la vision que les gens ont de « the home of the future ». Un premier grand groupe repense avec nostalgie aux maisons d’avant, rêve de sécurité et de stabilité, a peur de ce qui est nouveau. Le monde est devenu un endroit angoissant, instable. Une maison doit leur donner un sentiment de sécurité, leur procurer un petit coin au chaud et de l’assurance.

Un deuxième groupe se focalise sur le présent et peut difficilement imaginer le futur. Pour eux, la maison doit être efficace et offrir des solutions adaptées aux besoins d’aujourd’hui.

Un troisième groupe regarde l’avenir avec les yeux grand ouverts et est ouvert aux nouvelles technologies, à l’innovation et aux expériences. Ils considèrent l’aménagement des maisons comme une forme de cocréation.

En ce qui concerne le profil, le premier groupe, le plus grand et le plus « conservateur », comprend un peu plus de personnes âgées. Le troisième groupe, plus « innovant », compte davantage de jeunes, de citadins et de personnes ayant terminé leurs études supérieures. En termes de chiffres, le groupe le plus conservateur avec relativement plus de personnes âgées constitue encore la majorité pour le moment.

Transition démographique

En ce qui concerne l’évolution démographique, on note une forte augmentation du nombre de personnes âgées. Dans le monde, la croissance n’est pas encore une pandémie, semble-t-il. Nous voyons dans les statistiques et dans la rue qu’il y a plus de personnes âgées. En outre, cela nous est constamment rappelé par les débats politiques paniqués sur la viabilité financière des retraites et de la sécurité sociale. « Mais il y a aussi de bonnes nouvelles, dit Carsten Beck. En raison de l’amélioration des conditions de vie et de l’allongement de l’espérance de vie, les personnes âgées d’aujourd’hui et de demain ne sont plus comparables à l’ancienne génération d’il y a environ cinquante ans. Les générations des années cinquante, soixante et soixante-dix, en l’an 2018, sont souvent encore actives et dynamiques. Dès que les enfants ont quitté la maison et qu’ils sont eux-mêmes à la retraite, une nouvelle phase de vie commence, qui dure plus longtemps en raison de l’espérance de vie plus élevée. Ils ont du temps et de l’argent, consomment, apprennent à manier les nouvelles technologies, rénovent et investissent. Ils mettent leur maison au goût du jour, emménagent dans un appartement, construisent une maison adaptée à leurs nouveaux besoins, investissent dans une résidence secondaire. »

Une autre progression de taille est le nombre de célibataires. Il s’agit des personnes âgées restées seules après le décès de leur partenaire, ou les plus jeunes divorcés ou peu attirés par les relations stables. Les jeunes célibataires repoussent le fait de se caser, accordent plus d’attention à leur carrière, à leurs voyages et à leurs loisirs, ne veulent pas tisser trop de liens ni avoir trop d’attaches. Cette attitude influence leur mode de vie. Ils veulent pouvoir se déplacer rapidement vers un autre endroit. Une location ou un appartement avec un minimum d’espace et de mobilier suffit. C’est différent pour les célibataires plus âgés et les familles monoparentales. Ils préfèrent un appartement de ville compact et bien équipé qui nécessite peu d’entretien et soit abordable.

Vie compacte et urbaine

Tous les facteurs ci-dessus exercent une influence sur le mode de vie et l’habitat de demain. Les nouveaux bâtiments, les nouvelles formes d’aménagement et de vie communautaire gagneront en importance. À titre d’exemple, Carsten Beck cite des solutions de vie multifonctionnelles, le co-housing, des modèles de soins innovants, des formules de vie intergénérationnelles, des modes de vie compacts et à court terme dans des maisons intelligentes telles que maisons mobiles, éco-capsules et maisons conteneurisées.

La tendance vers de plus petites unités de logement est déjà présente aujourd’hui et se poursuivra. Plus les logements et les appartements sont petits, plus la question se pose de savoir ce qui est nécessaire individuellement, ce qui peut ou doit être fait conjointement, et quelles solutions technologiques intelligentes peuvent améliorer la qualité de vie. Moins il y a d’espace, plus il est nécessaire de trouver des solutions intérieures bien pensées, telles que des meubles multifonctionnels, et des diviseurs d’espace intelligents comme des armoires à double face au lieu de cloisons. En ce sens, l’équipement standard doit également être repensé. Pourquoi installer une cuisine entièrement équipée alors que les occupants ne cuisinent plus ?

Il faut également penser à l’endroit, à l’emplacement de notre lieu de vie futur. Le logement se déplacera fortement vers la ville et la zone intérieure à la périphérie, près des magasins, des écoles, du travail, des installations de loisirs, des espaces verts, des transports publics et d’autres infrastructures. Les villes s’agrandissent, les hauts immeubles et les complexes résidentiels souterrains augmentent la densité. « La multifonctionnalité devient la norme, prédit Carsten Beck. Les bâtiments du futur, implantés avec des options de transport jusqu’à 500 mètres, combinent plusieurs fonctions : vie, travail, activités commerciales, services, loisirs. » D’ici 2050, on estime que 75% de la population mondiale vivra dans des mégalopoles et des zones urbanisées. Les villes doivent donc être plus intelligentes et plus durables.

Ceux qui récemment ont suivi la brillante série de reportages sur la Chine du photographe hollandais et spécialiste de la Chine Ruben Terlou sur Canvas ont observé comment la croissance exponentielle de la population fait éclater les villes nouvelles et anciennes et envoie les tours résidentielles dans le ciel. « Et quel est le résultat ? Beaucoup de gens ne sont pas heureux dans ces tours résidentielles. Leur rêve est une villa individuelle à la périphérie de la ville », commente Carsten Beck.

Par Colette Demil

Vous pouvez lire plus d’informations sur le domaine d’activité et les études du Copenhagen Institute for Futures Studies sur www.cifs.dk.

WOOD.BE

WOOD.BE, qui a attiré à Bruxelles le Copenhagen Institute for Futures Studies, avec lequel il travaille depuis longtemps, a été fondé par et pour l’industrie belge du bois et de l’ameublement. Le centre de connaissances est ouvert à la collaboration avec les entreprises, les instituts de connaissances, les prestataires de services et les prescripteurs tels que les architectes, les architectes d’intérieur et d’autres concepteurs. Sur www.WOOD.be, vous trouverez un aperçu des projets de WOOD.BE. Caresit, par exemple, élabore un cadre objectif pour le développement et l’évaluation de sièges pour le secteur des soins. Fireresist se concentre sur les modèles de calcul de la résistance au feu des éléments de murs, de sols et de toits en bois. Le cas de FutureFurniture est intéressant, il s’agit d’un réseau dynamique fait par et pour les entreprises innovantes actives dans ou autour de l’univers des meubles : producteurs de meubles ou de produits d’intérieur connexes, fournisseurs, designers et concepteurs. L’objectif principal est de créer une collaboration pouvant aboutir à la cocréation de nouveaux produits et services, recherche conjointe, coopération commerciale, échange d’expériences dans un réseau d’apprentissage... En termes d’activités, le séminaire tendance Optimo de juin est une valeur sûre avec une présentation des tendances d’intérieur et du mobilier des foires de printemps.

www.wood.be